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Partie 1 - Qui est responsable et quel est le plan?

"Nous sommes allés à l'hôtel de ville, nous n'avons rien appris. Nous sommes allés à Terre des Hommes, rien ... Donc, jusqu’à présent nous n’avons rien reçu. Rien. Nous sommes assis ici et nous n'avons aucune idée de ce que l’avenir nous réserve. "

                               - Rosie Benjamin, membre du Comité de Camp Parc Sentra

"Il n'y a pas un plan pour nous indiquer à quel endroit on doit aller. Jusqu'à présent, personne ne nous a dit où aller. "

                                      - Jean Widdy Saint-Félix, membre du Comité de Camp Simon Bolivar Camp

Neuf mois après le tremblement de terre catastrophique en Haïti qui a tué quelque 300,000 et laissé 1.3 million sans abris, plusieurs rapports et articles continuent de dénoncer les conditions terribles dans les 1,354 camps sordides, Ayiti Kale Je a décidé de se pencher sur la question.

• Y a t-il un plan pour les réfugiés, et si oui, quel est-il?
• Qui est responsable?
• Est-il efficace?

Une douzaine d'interviews, des dizaines de documents et de nombreux appels téléphoniques plus tard, Ayiti Kale Je a découvert qu’il existe un plan. Toutefois, il n'est pas facilement accessible aux médias ou au public haïtien, il n’est pas très bien coordonné et à ce jour, il n'est pas supervisé par un organisme d’état ou un ministère haïtien, ce qui rend difficile voire impossible, la responsabilisation.
Cet article est le premier d'une série de trois qui examine le plan, ses défis et son efficacité.

N'oubliez pas de lire les deux autres articles:

Partie 2 – Quels sont les défis?
Partie 3 – Sera t-il efficace?

 

 

Chaque semaine il ya de nouveaux rapports et articles sur les conditions terribles dans les camps. Cette photo provient d'une étude récente des conditions de camp et les rôles joués par les ONG - Unstable Foundations.

 

 

 

 

Qui est responsable?

Alors que cinq ministères du gouvernement haïtien sont en quelque sorte touchés par la question (Planification, Intérieur, Travaux Publics, Affaires Sociales et Economie et des Finances), il apparaît que la planification et la coordination du relogement des 1.3 million de personnes déplacées interne ont jusqu'ici été supervisées et gérées par des entités étrangères - deux des 12 "Clusters" ("regroupements") - le Cluster Logement et de la Coordination et la Gestions des Camps (CCCM).

Les Clusters sont des regroupements d'organismes des Nations Unies, des organisations non-gouvernementales (ONG) et d'autres organisations internationales autour d'un secteur ou d’un service fourni au cours d'une crise humanitaire. Le personnel international essaie de réunir et de coordonner les ONG et les organismes en fonction du domaine d'intervention.

Les réunions nationales et locales des Clusters se produisent chaque semaine, mais les comptes rendus et les rapports des participants indiquent que – dans les cas de Logement et CCCM – les ministères participent rarement a ces réunions, dont beaucoup se déroulent en anglais. (Il faut indiquer que, les représentants du gouvernement au niveau local participent dans les réunions des Cluster.) [Voire notre article - Le Système "Cluster" en Haïti]

Le manque de coordination et de participation du gouvernement au niveau national est un obstacle, d’après Gehard Tauscher, le coordonnateur du Cluster Logement. Il ajoute qu'il souhaite que «toutes les couches du gouvernement se réunissent pour parler d'une seule voix."

"Je voudrais qu'ils enferment tous les gens dans un endroit agréable pour un week-end - l'ONU, le personnel des ONGs et le gouvernement national - et qu’ils ne les laissent pas sortir avant de prendre des décisions," a t-il dit.

Un membre du personnel Cluster Logement, Deborah Hyde, gestionnaire de l'information pour le Cluster Léogane, a utilisé un peu moins de tact.

"Nous avons besoin de leadership et, malheureusement, dans ce pays, la capacité pour cela n'est pas là," dit Hyde à Ayiti Kale Je.

Tauscher et d'autres ont reconnu que le gouvernement national n’a pas pu prendre  la question du logement en main immédiatement, en partie à cause du fait qu'il a été directement touché par le tremblement du terre – environ 20% des employés d’administration publique ont été tués ou blessés, et sept des 11 ministères se sont effondrés.

Mais neuf mois plus tard, il semble toujours y avoir un manque de coordination et de leadership.
L'absence des ministères pourrait également être due à l'usurpation, réelle ou apparente, du pouvoir par la Commission Intérimaire pour la Reconstruction d'Haïti (CIRH), la commission de 30 membres dirigé par l'ancien président américain Bill Clinton et le premier ministre haïtien Jean Max Bellerive.

Il semble qu’il y a un manque de coordination entre la CIRH et le Cluster Logement également.
Un Powerpoint du Cluster Logement obtenu par Ayiti Kale Je en date du 4 octobre finit avec cette proposition – "Dans l'avenir ... la coopération / intégration de S[helter] C[luster] / Système Cluster avec la CIRH?" [notre traduction]

La question posée dans cette présentation indique que jusqu’à présent, "la coopération" et l’"intégration" entre le Cluster Logement et la CIRH n'ont pas encore eu lieu.

Malheureusement, de nombreuses tentatives pour parler avec les autorités gouvernementales haïtiennes – ministères et CIRH – se sont heurtées à des portes closes et des appels téléphoniques sans réponse.
Malgré de nombreuses tentatives pour interroger des membres de la CIRH, y compris Priscilla Phelps, "Senior Shelter Advisor " à la Commission sur un contrat de l'US AID, Ayiti Kale Je a été plutôt renvoyé aux hommes d'affaires du secteur privé, membres d’une commission ad hoc créée en Janvier, mais qui, il semble, n’existe plus.

Elle comprenait le banquier Charles Clermont, le ministre du tourisme Patrick Delatour, qui est également copropriétaire d'une entreprise de construction et de ciment, et Gérald-Emile "Aby" Brun, architecte et hommes d’affaires.

Clermont et Delatour n'ont pas retourné nos appels et courriels, et Brun nous a suggéré d'appeler plutôt  le ministère de l'intérieur. Ensuite il a plaisanté: «Nous sommes tous en train de nous renvoyer la balle, n'est-ce pas?"

Interrogé sur le rôle des ONG, des plans de relogement des résidents du camp et les menaces d'expulsion, Brun a critiqué les ONG pour "protéger les squatters. " Brun est propriétaire d’une partie des terres choisies par le gouvernement pour installer un camp de relocalisation.

Qu'est-ce que dans le plan?

Jusqu'à présent, aucun organisme n'a rendu public un plan, mais Ayiti Kale Je a obtenu un document daté du 27 Septembre intitulé «Stratégie de retour et de relocalisation – Draft 5" qui décrit le plan des agences de l'ONU et les Clusters.

Selon des sources au sein du Cluster Logement, le plan a été remis au " gouvernement haïtien », mais on ignore à quels ministères, organismes, commissions ou bureaux.

Le plan prévoit, en vue de la faisabilité:

"[1] Le retour sur lieu d’origine… ; [2] La relocalisation en province d’où ils sont originaires et/ou ils possèdent des terres ...; [3] La relocalisation vers un site planifié, en dernier recours."

Le plan prévoit que "[l]es services de base seront graduellement accessibles dans les quartiers d’origine et diminueront progressivement dans les camps afin de créer un facteur d’attraction vers les quartiers d’origine…"

Afin de pousser les habitants des camps à partir, les agences vont leur offrir aussi ce que l'USAID appelle les "paquets de retour."

Par exemple, un déplacé peut recevoir en espèces (US$150 pour les personnes dont le  logement est en bon état, une moyenne de US$1,000 pour ceux qui ont besoin de réparer leurs maisons), un contrat de travail au salaire minimum "argent-contre-travail" pour un mois, et bons scolaires et des nourriture.

En raison de la surdensité des anciens quartiers avant le 12 janvier, et du fait que certains quartiers sont inadaptés pour le logement, tout le monde ne pourra pas retourner dans les quartiers d’origine. Ces personnes seront relocalisées dans des nouvelles cités, probablement situées sur un morceau de 7,000 hectares de terres que le gouvernement a déclaré "d’utilité publique" plutôt cette année.

Les 7,000 hectares des terres. Le camp de Corail-Celesse est entouré en rouge.
Tiré d'une présentation d'ONU-Habitat.

Avant la construction de maisons permanentes, les ONG et les organismes prévoient de construire 135.000 "abris transitoires" ou "T-Shelters," qui sont de 12 à 18 mètres carrés, ossature en bois ou en métal, murs de bois ou de plastique, et toit de tôle. Le coût, incluant le transport, les douanes et du travail, est d'environ US$1500 à US$2500 chacun. Les bailleurs de fonds ont déjà financé 120.000, ce qui signifie que US$240 millions de dollars ont été alloués pour ces derniers. Jusqu'à présent, environ 15.000 ont été construits.

Tous les 135.000 T-Shelters ne seront pas achevés avant Septembre 2011, selon un document récent du Cluster Logements. Dans l'intervalle, diverses ONG, comme CHF International travaillent sur des petits projets de quartier.

Un autre exemple est Habitat for Humanity, qui prévoit de construire des logements pour 50.000 familles dans tout le pays au cours des cinq prochaines années, selon le directeur Claude Jeudy. Mais, a t-il noté, à ce jour il n'existe pas de plan coordonné global qui dit à"chaque acteur ... quel rôle il doit jouer ... s'il y a un plan, je ne l'ai pas vu."

De retour au bureau Cluster Logement, des cartes murales indiquent quelle ONG s'est portée volontaire pour coordonner la réinstallation dans quelle zone, mais il y a des grands espaces blancs, ce qui signifie qu'il n'y a personne - aucune ONG, aucun organisme étranger ou local, aucune agence des Nations Unies - responsable de la réinstallation des déplacés dans les camps de ces zones.

"On a besoin de plus d’agences dans ces régions," dit Tauscher, en montrant des Tabarre et le bidonville Cité Soleil.

Par ailleurs, la grand-mère de Saint-Félix, qui ne peuvent plus supporter la chaleur sous les tentes, est retournée dans sa maison. Une fissure géante traverse l’un des murs. Un mur autre est tombé complètement. Une feuille de plastique bleu l’a remplacé.

Benjamin n'a pas la même chance. Le tempête du 24 Septembre a trempé tous ses biens et a détruit sa tente. Sa famille s’est installée avec un ami, dans une tente étouffante, bondée, poussiéreuse. Les rayons du soleil de couleur bleue brillent à travers les parois en plastique et donnent aux piles de vêtements et de vaisselle une apparence encore plus sordide et triste.

Partie 2 – Quels sont les défis?

Partie 3 – Sera t-il efficace?

Le système "Cluster" en Haïti

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